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Alain de La Morandais
13 avril 2006

jeudi saint

Jeudi saint 2006-04-13 : le lavement des pieds

« Qu’ils sont beaux les pieds des messagers de bonnes nouvelles ! » (Rom.X,15)

St Paul, dans sa Lettre, cite Isaïe : « Qu’ils sont beaux sur les montagnes les pieds du porteur de bonnes nouvelles, qui annonce la paix, qui apporte la Joie et annonce le salut ! » (Is.52,7)

Le mot et l’image du « pied » reviennent indéfiniment dans les textes bibliques, à tel point qu’il serait fastidieux d’en faire la recension complète. Relevons simplement , au sens propre, qu’on liait les pieds et les mains de ceux que l’on voulait réduire à l’impuissance, que le vainqueur mettait le pied sur le cou du vaincu, que les êtres dits inférieurs servaient d’escabeaux aux pieds du supérieur, qu’on embrassait les pieds de quelqu’un en manière de supplication et de vénération, qu’on faisait des onctions sur les pieds du Grand Prêtre pour les consacrer, qu’il fallait avoir les pieds chaussés pour manger la Pâque mais les pieds nus dans un endroit consacré par la présence de Dieu. Les prêtres servaient pieds nus dans le Temple.

Au sens figuré, être assis aux pieds de quelqu’un, c’est être placé sous sa dépendance ou sa protection ; Job dit qu’il a été le pied du boiteux, pour indiquer qu’il a exercé la charité envers les malheureux, quelle que fut leur infirmité ; les pieds au large ou sur le roc signifient la prospérité et la stabilité. Dans certains textes, « les pieds » sont le mot utilisé pudiquement pour nommer les organes sexuels …(« C’est le pied ? »)

« De la plante des pieds au sommet de la tête » désigne le corps tout entier : autrement dit, c’est prendre la partie pour le tout, comme dans le rite du lavement des pieds.

Si l’on marche habituellement nu-pieds ou avec de simples sandales sur un sol desséché et naturellement poudreux, il devient nécessaire de se laver souvent les pieds. C’était le cas en Palestine et dans tous les pays environnants. Aussi le premier devoir de l’hospitalité était de procurer à son hôte le moyen de se laver les pieds, pour les débarrasser de la poussière, les rafraîchir et les délasser. L’effet produit sur cette partie du corps, à la fois si résistante et sensiblement vulnérable, retentissait sur le corps tout entier avec une sensation de bien-être et de plaisir. Depuis l’accueil des « anges » au chêne de Mambré par Abraham jusqu’à l’histoire de Tobie, cet usage est constant dans la Bible .

Avant d’entrer dans le Tabernacle, Moïse, Aaron et ses fils devaient se laver les mains et les pieds et cette loi fut suivie par tous les prêtres, pour marquer qu’ils devenaient les hôtes du Seigneur.

Invité par le pharisien Simon, Jésus lui adressera ce reproche : « Je suis entré dans ta maison et tu ne m’as pas donné d’eau pour laver mes pieds. » C’était l’office des serviteurs que de laver les pieds de leur maître … et Madeleine remplit cette fonction humble, en baignant les pieds du Seigneur de ses larmes et en les essuyant avec ses cheveux. Avant d’instituer l’Eucharistie, Jésus veut bien exercer Lui-même l’office du serviteur en lavant les pieds des Douze, en précisant à Pierre que celui qui a pris un bain n’a plus besoin que de se laver les pieds, s’il vient du dehors. Le Messie éclaire Lui-même pédagogiquement son geste, en disant que c’est une leçon d’humilité – probablement pour répondre à la compétition de préséance qui a eu lieu entre les disciples avant le repas ; une leçon de charité (d’agapè) et de purification. Trois dispositions requises pour participer au repas eucharistique.

Dans les Eglises des Gaules et de Milan, c’était l’usage de laver les pieds des néophytes, avant ou après la cérémonie du Baptême. St Augustin attribue à ce rite un but purement physique ; comme le bain était alors incompatible avec le jeûne du Carême, il convenait que les catéchumènes eussent les pieds lavés avant de descendre dans le baptistère. St Ambroise de Milan, lui, au con traire, faisait du lavement des pieds un rite complémentaire du Baptême et ajoutait que celui-ci remettait les péchés personnels et le lavement des pieds les péchés héréditaires (cf. péché originel).

Ce rite s’étendit enfin jusqu’à la liturgie romaine, puisque le pape procédait à ce rituel avec douze sous-diacres et que l’empereur de Constantinople n’était pas en reste, puisqu’il lavait les pieds de douze pauvres le jeudi saint, inspirant par la suite nombre de princes chrétiens qui agirent de même, en joignant quelques bourses de monnaies sonnantes et trébuchantes dans les mains des gueux, afin de les remettre sur pieds.

Service des démunis et service eucharistique sont intrinsèquement liés. Inséparables. 

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