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Alain de La Morandais
12 mars 2006

Chapelle de l’Agneau Vainqueur 2è dimanche de

Chapelle de l’Agneau Vainqueur 2è dimanche de Carême

12 mars 2006 Marc IX, 2-10

Transfiguration : Présence et absence !

Relatée par trois témoins privilégiés mais éprouvés, la Transfiguration est une expérience de Présence te d’Absence de Dieu. La célébration eucharistique est une expérience, vécue communautairement, de présence et d’absence de Dieu. A la fois.

Sur une haute montagne, dont le nom demeure ici inconnu, les trois compagnons, certes, vont en voir, de leurs yeux charnels voir plus qu’ils n’en ont jamais vu du Nazaréen : Il va se révéler à eux d’une manière si extraordinaire , c’est à dire en dehors de toutes les normes de perception habituelle, - tout en gardant l’usage de leur vue et de leur langue ! – qu’ils en ressentent une crainte extrême. Ils sont les témoins effrayés d’une métamorphose, d’une visite – celle de Moïse et de Elie – et puis soudain pris sous l’ombre d’une nuée, ils ne voient plus Rien !

Ne retenir de la Transfiguration que le côté irradiant, glorieux, luminescent et émerveillé, ce n’est que souligner le mode d’une Présence qui devient si vite insoutenable que l’effroi saisit les participants et que la nuée les recouvrant dissimule tout au regard, et manifeste l’Absence à la prise visuelle : il n’y a plus rien à voir !

Présence te absence sont indissociables de cette expérience religieuse qui est une expérience de différence : tout, dans ce récit, souligne la distance existant entre Jésus et les siens, y compris les plus proches. Pour Pierre, Jacques et Jean, après cet évènement, Jésus sera le même et différent. Comme après la Résurrection : à la fois continuité et discontinuité. Les trois compagnons anticipent ici l’expérience pascale de la continuité et de la discontinuité. Avant Pâques, donc, trois des disciples vont faire une expérience de la différence que représentait Jésus, et si le Seigneur de la Résurrection est à la fois reconnaissable et différent, c’est bien parce que les témoins de sa vie l’avaient connu et pour une part expérimenté déjà , avant la Résurrection, dans sa différence.

Jésus dévoile enfin, quoique partiellement, sa vraie nature divine, mystérieuse, inaccessible à nos sens : ce dévoilement – apocalypse !- apparaît bien redoutable à ceux qui en sont les témoins : cela veut dire que nous ne pouvons pas supporter le Fils de Dieu dans Sa Vérité Divine, sans détour, sans médiation. L’Incarnation est un détour : la nature humaine de Jésus occulte quasi complètement sa vraie nature divine qu’aucun regard humain ne peut supporter. Disons le tout net : l’Incarnation est une ambiguïté nécessaire qui cache plus le Fils de Dieu qu’elle ne Le révèle ; et heureusement pour nous : nous ne pourrions soutenir l’éblouissement divin !

Ce qui est extraordinaire dans le Jésus historique, charnel, c’est l’ordinaire de son apparence humaine, qui nous voile sa vraie nature divine. De même, ce qui est extraordinaire dans la Présence du Ressuscité à l’Eucharistie, c’est l’ordinaire des signes par lesquels Il est tout à la fois Présent et Absent :

-         présent et absent par sa Parole d’aujourd’hui, à nous livrée, pour nous et par nous partagée, multipliée et jamais possédée ;

-         présent et absent par ce Corps que nous formons, ici, réunis en Son Nom, ce Corps de prière et de communion : nous sommes « le Corps du Christ » ! Par nous il se signifie, il est re-présenté ; par nous il est évacué, dissous, si nous ne formons pas communauté eucharistique ;

-         présent et absent par le Pain et le Vin, réservés, mis à l’écart, consacrés, signes de la distance entre l’humain et le divin, signes de la Présence qui veut s’incorporer à nous, tout en renvoyant au Père ;

Le peu que Jésus a laissé paraître à ses contemporains de sa supériorité divine leur était insupportable : ils l’ont fait disparaître. L’idée seul qu’Il pu être l’égal du Père, Dieu Lui-même, leur était insoutenable : les enfants des ténèbres ont peur de la Lumière !

Et nous, nous ne pouvons que nous accommoder du clair-obscur de la foi.

Gardons nous bien de prétendre à des signes prodigieux pour croire à la Présence du Ressuscité à l’Eucharistie ! Des signes, humbles et précieux, nous sont déjà donnés – la Parole, les frères réunis en Son Nom, le Pain et la coupe - : à nous de les reconnaître !

Comprenons bien, en contemplant l’hostie, au moment de l’élévation que nous n’allons pas être effrayés par son incandescence mais plutôt couverts par cette ombre lumineuse, intérieure, qui nous fait connaître qu’il n’y a rien à saisir par nos yeux, parce que rien n’est plus proche de l’absolument Tout que l’absolument Rien : un nouveau-né ordinaire dans une crèche, un crucifié lamentable, un morceau de pain, sans poids ni prix. Presque rien.

Père de La Morandais

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