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Alain de La Morandais
19 mars 2006

homélie pour le 19 mars 2006

Le Temple Jean II,13-25

Tout en jouant un rôle essentiel dans le culte d’Israël, le signe du Temple n’est cependant pas dénué d’ambiguïté. Pour des hommes au sens religieux superficiel, les cérémonies qui s’y déroulent tendent à devenir des gestes vides de sens. En outre, l’attachement qu’ils ont envers lui risque de tourner à la confiance superstitieuse. Comme toujours, dès que la religion s’installe, la perversion la guette : on devient plus vite attaché aux rites, à la forme qu’à l’esprit – c’est pourquoi les prophètes sont devenus assez rapidement très nuancés à l’égard du Temple. A l’envi, Isaïe, Jérémie et Ezechiel dénonceront le caractère superficiel du culte qui s’y déroule, voire même des pratiques idolâtriques qui s’y introduisent. L’abandon par Yahwe de cette demeure est envisagé et annoncé : le Temple sera détruit !

Les menaces de Jérémie, puis la destruction de l’édifice et surtout l’expérience de l’exil vont contribuer par la suite à mettre en évidence la nécessité d’un culte plus spirituel, correspondant aux exigences de la religion du cœur. En terre d’exil, on réalise mieux que Dieu est présent partout où Il règne, comme si le culte spirituel repris par Dieu – celui des pauvres et des cœurs contrits – s’accommodait mieux d’une présence spirituelle de Dieu, détachée des signes sensibles.

Jésus, comme les prophètes, professe pour le Temple ancien le plus profond respect : il y est présenté par Marie, il s’y rend pour les solennités et semble en approuver les pratiques cultuelles, tout en condamnant le formalisme qui risque de les vicier : « Vas d’abord te réconcilier avec ton frère ! » Le Temple est pour lui la Maison de Dieu, une maison de prière, celle de son Père et il s’indigne qu’on en fasse un centre de trafic. D’où le geste prophétique relaté par saint Jean. (cf. évangile d’aujourd’hui)

Et pourtant, il annonce, lui aussi, la ruine du splendide édifice sacré dont il ne restera pierre sur pierre. Cela lui sera vivement reproché durant son procès, à tel point que l’on peut penser que cet épisode a été le déclic religieux et politique de son arrestation.

Au moment du râle suprême, sur le gibet, le déchirement du voile du Saint des Saints dans le Temple montre que l’ancien sanctuaire perd son caractère sacré : le Temple a fini de remplir sa fonction de signe de la Présence divine !

En effet, cette fonction est désormais remplie par un autre signe qui est le Corps même du Fils de l’Homme. L’évangile de Jean place dans le contexte de la purification du Temple la parole mystérieuse sur le sanctuaire détruit et reconstruit en trois jours .Mais il ajoute : «  Il parlait du sanctuaire de son corps. », et ses disciples, après la Résurrection, le comprirent. Voici donc le temple nouveau et définitif, qui n’est pas fait de main d’homme mais qui épouse radicalement et complètement la condition humaine, celui où le Verbe établit sa demeure parmi les hommes. Cependant, pour que le Temple soit déchu, il faut que Jésus lui-même meurt et ressuscite : le Temple de son Corps sera détruit et rebâti !

Après la Résurrection, ce Corps, signe de la Présence divine, connaîtra un nouvel état transfiguré qui lui permettra de se rendre Présent à tous les lieux, et à toutes les assemblées et durant tous les siècles de trois manières :

-          l’ecclesia, l’assemblée des croyants réunis en son Nom ;

-          le signe eucharistique du Pain et du Vin ;

-          la présence des pauvres auxquels Jésus s’est radicalement identifié.

L’ecclesia est le temple de Dieu. Les premières communautés chrétiennes prirent rapidement conscience, après la rupture avec le Temple de Jérusalem et le judaïsme, qu’elles constituent elles mêmes le nouveau Temple, le temple spirituel, en prolongeant le Corps du Christ. D’où l’enseignement de saint Paul : l’Eglise est le Temple de Dieu, édifié sur le Christ, fondement et pierre angulaire. Voilà pour l’aspect communautaire.

Et individuellement, chacun des membres de cette Eglise est pareillement temple de Dieu, temple de l’Esprit, membre du Corps du Christ.

Les deux choses sont liées : puisque le Corps ressuscité de Jésus, en qui habite corporellement la divinité, est le Temple de Dieu par excellence, les chrétiens, membres de ce Corps, sont avec Lui le Temple spirituel.

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